Comportement différent à l'échelle macroscopique (la nôtre) et nanométrique
Ces dernières années, l’émergence des nanosciences a ouvert la voie à la manipulation de fluides dans des structures de dimension nanométrique. Les chercheurs ont ainsi mis en évidence des comportements physiques nouveaux, dû à la prépondérance des effets de surface à cette échelle.
Première observation (2016) et hypothèses
En confinant dans un nanotube de silice hydrophile, un mélange initialement miscible à notre échelle (alcool/hydrocarbure), les physiciens de l'Institut de physique de Rennes (IPR - Université de Rennes 1/CNRS) avaient montré par diffraction de neutrons la formation d’une structure cœur-coquille.
À l'aide de différents modèles théoriques, les scientifiques avaient émis l'hypothèse que les molécules d’alcool se retrouvaient accolées à la surface du nanotube, tandis que celles de l’hydrocarbure se retrouvaient rejetées au cœur du nanotube.
Autres méthodes, même constatation et explication du phénomène
Cette fois-ci, c'est en utilisant la simulation moléculaire et des calculs de propriétés locales comme la tension de surface que les chercheurs de l'IPR ont reproduit quantitativement ce phénomène.
Ils ont de plus démontré sans équivoque la séparation à l’échelle nanométrique de ce mélange, pourtant miscible à l'échelle macroscopique.
Dans le cas du nanotube de silice, ils ont montré que la séparation de phase était reliée à la chimie de surface et à un réseau de liaisons hydrogène s’établissant entre la surface de silice et l’alcool.
Démonstration en modifiant les propriétés hydrophobes du nanotube
Ils ont aussi établi la possibilité de contrôler cette « nano-démixtion » en ajustant l’hydrophobicité du matériau poreux.
Ainsi, en confinant ce même mélange dans un nanotube de carbone, l’organisation cœur-coquille a pu être inversée. En effet, tandis que l'hydrocarbure s’accumule à la surface du nanotube par interactions hydrophobes, l’alcool se retrouve piégé au centre du pore où les molécules optimisent leur réseau de liaisons hydrogène.
Perspectives
Ce travail ouvre ainsi la voie à la nanostructuration contrôlée de fluides multiconstituants par confinement.
Source et référence
Cet article a été rédigé à partir d'une présentation d'Aziz Ghoufi, maître de conférences à l'Université de Rennes 1 et membre de l'Institut de physique de Rennes (Université de Rennes 1/CNRS).
Microphase separation of a miscible binary liquid mixture under confinement at the nanoscale
Ilham Essafri, Denis Morineau & Aziz Ghoufi
npj Computational Materials volume 5, Article number: 42 (2019)